La voix de Rilke aura été la dernière voix européenne à nous séduire. Le destin ne pouvait mieux le servir qu'en le fixant en Suisse, ce carrefour européen, cette île où demeurait un peu de fraîcheur même aux heures orageuses. Ainsi, parfaitement à l'écart de toute influence trop exclusive mais les assimilant toutes, hors et au milieu du monde, Rilke, à Muzot, nous apparaît comme le dernier poète dont la vie elle-même est poésie, le dernier Européen dont le cœur ne faiblit pas aux heures douloureuses où les patries rappellent si sûrement leurs enfants, même les plus prodigues.